La Côte d'Ivoire: le pays ne réussit pas à se nourrir lui-même, pourtant il demeure un pays agricole

Les importations de produits alimentaires n'ont cessé de progresser depuis l'Indépendance de la Côte d'Ivoire. La situation alimentaire s'est ainsi dégradée de façon continue, et la Côte d'Ivoire fait partie des pays, par tête d'habitant,  les plus dépendant sur le plan alimentaire en Afrique de l'Ouest. Cette situation est due à l'augmentation de la population, mais également à l'urbanisation et au changement des comportements alimentaires qu'elle a induits. Ceci a provoqué une forte progression de la consommation céréalière à laquelle l'agriculture familiale a cherché à s'adapter en inversant la proportion de sa production céréalière, mais cela n'a pas suffi pour assurer l'autosuffisance alimentaire nationale du fait que la production nationale n'ait pas suffisamment augmenté, ait été trop irrégulière pour suivre la demande, ou encore n'ait pas correspondu aux nouvelles demandes liées à l'évolution des comportements alimentaires (consommation de pain, de riz important, de viande surgelé) . 

La relance de la production alimentaire des famille paysanne
L'amélioration des performances de l'agriculture familiale constitue incontestablement une des conditions de la souveraineté alimentaire en Côte d'Ivoire, l'autre étant l'orientation de la consommation vers du consommer local et sain. Il faut ici apprécier le poids que représentent les familles rurales dans la société Ivoirienne  pour estimer l'importance que peut avoir la contribution des exploitations familiales au relèvement de ce défi. La population actuelle de la Côte d'Ivoire avoisine les 25 millions d'habitants, alors qu'elle n'était que de 3,5 millions au début des années 1960. Bien que la Côte d'Ivoire ait entamé sa transition démographique, cette progression va encore se poursuivre pour atteindre 48,79 millions en 2050 (Population Pyramid). 60% de la consommation alimentaire en Côte d'Ivoire est une consommation de produits locaux, de pauvre paysan dont les fils rallient progressivement les villes. De là à penser que l'avenir du de la Côte d'ivoire n'est pas dans le monde rural ni dans son économie agricole, il n'y a qu'un pas à franchir. 

Une observation plus attentive des réalités
D'une part la population rurale est encore aujourd'hui légèrement majoritaire. Mais surtout, la proportion de ménages ruraux agricoles est très élevée, avec une valeur moyenne nationale de 87,9%, et les emplois agricoles représentent plus de 70% de l'ensemble des emplois nationaux. Si la population rurale Ivoirienne s'urbanise, elle demeure de façon prépondérante agricole, et ses assises sociales restent profondément rurales. La croissance spectaculaire de la capitale masque le fait qu'une grande partie de ses habitants est toujours reliée aux familles rurales auxquelles ils appartiennent, et que certains continuent de vivre directement de l'agriculture (1 actif agricole sur 10 vit en ville).  La réalité sociologique et économique rurale reste profondément rurale et l'avenir de ce pays doit être pensé en partant de cette donnée.

Des conditions de vie dans le monde rural qui n'assurent pas le bien-être aux populations 

En Côte d'Ivoire,  la majorité des pauvres vivent en milieu rural (selon les zones, entre 72% et 88% de la population rurale est pauvre, selon les critères des Nations Unies). Selon le FIDA, en milieu rural, alors que 70% des dépenses mensuelles des familles sont consacrées à l'alimentation, rares sont celles qui peuvent assurer deux repas par jour. L'accès aux soins de santé est difficile, et bien que 70% des ménages ait accès à l'eau potable, ce chiffre masque de fortes disparités entre les régions. Les ménages des zones rurales ont aussi moins accès aux revenus provenant des transfert des travailleurs émigrés et ont plus de difficultés à obtenir des prêts et à avoir accès à l'éducation, aux services d'appui et aux intrants. Trois phénomènes doivent être particulièrement pris en considération: 
  • Celui, de la concentration de la population et des activités économiques en capitale qui déséquilibre le pays en marginalisant les régions "périphériques".
  • Celui de la prépondérance des jeunes dans cette population (78% des ivoiriens ont moins de 35 ans), plus marquée dans le monde rural que dans le monde urbain du fait que le taux de fécondité y soit plus élevé. La demande des familles rurales va donc être de plus en plus forte en termes de scolarisation et de formation professionnelle des enfants et en termes de demande d'emploi pour les jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Mais l'offre ne suit pas. 
  • Celui de la faible attractivité des emplois en milieu rural. D'une part le sous emploi  est plus fort en milieu rural (25,1%) qu'en milieu urbain (17,6%). D'autre  Personnes travaillant moins de 40 heures par semaines, et qui sont disponibles pour effectuer un travail complémentaire. Cette situation s'explique notamment par le fait que les secteurs en croissance en Côte d'Ivoire (Technologie, huilerie, traitement des produits halieutiques, ciment, tourisme et télécommunications) sont faiblement créateurs d'emplois.
La crise des secteurs traditionnels d'absorption des actifs, notamment l'agriculture, est une des causes principales de la montée du chômage et de l'impasse dans laquelle se trouvent les jeunes actifs  part les ruraux qui s'adonnent à des activités non agricoles (par exemple dans le secteur des transports) sont dans beaucoup de cas les employés de personnes vivant en milieu urbain car ils n'ont pas la capacité d'investir ni acquis les qualifications professionnelles pour être eux-mêmes des entrepreneurs. Ces emplois non qualifiés sont dans les plupart des cas très faiblement rémunérés et n'offrent aucune perspective de promotion. Il en va de même pour les emplois salariés offerts aux ruraux par les entreprises agricoles ou agro-alimentaires. Un processus de prolétarisation des ruraux est ainsi en train de se mettre en place. Si rien ne change, l'avenir s'annonce de plus en plus difficile dans le monde rural où les écarts vont se creuser, les frustrations s'accuser et les tensions s'accroître.

La mobilisation des familles rurales - notamment des jeunes vers le secteur, dans un effort national n'est possible que si des raisons leurs sont données d'espérer un changement et un avenir meilleur. C'est une condition pour qu'elles investissent dans la transformation nécessaire des exploitations familiales. 

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